lundi 11 décembre 2006

Dehors, on joue au foot.



Dehors, on joue au foot.
Au travers de la grille, protégeant la fenêtre du bureau du conseiller principal d’éducation, se profile une lucarne à l’intérieur de laquelle un gosse se suspend à la barre horizontale : c’est le gardien.
Moi aussi je suis le gardien, je garde sacs et blousons, l’argent des élèves quelquefois.
C’est plus un bureau, c’est une consigne !
Actuellement, je suis dans ce bureau, fermé par une porte : « Ah, quel soulagement !»
- « Nique ta mère ! »
- « allez, merci, j’y vais ! »
Ces phrases proviennent de la fenêtre ouverte, les joueurs sont acharnés… après leur mère.
Derrière cette porte, c’est le bureau des pions : Un hall de gare avec un comptoir en bois, une chaise et une table derrière le comptoir, deux fauteuils et un relax devant.
- « Farouk ! », tiens, ça m’rappelle étrangement quelque chose… un gosse de la résidence, un p’tit con.
Ca doit faire une grosse demi-heure que je suis dans ce bureau, seul.
- « Ta mère ! Ton père ! Ta famille ! » Ces douces paroles s’élancent telles des verges molles contre la grille de la fenêtre grande ouverte.
Pour l’instant on ne me dit rien. Entre pions et appelés du contingent, le courant circule.
J’ai comme l’impression d’avoir été parachuté « Va niquer ta mère ! » là, sans raisons valables.
Je viens de dire à Naïma, la surveillante, que deux autres appelés du contingent allaient arriver.
Elle a répondu qu’il y avait de quoi faire ! Peut-être voulait-elle dire qu’il y avait des crayons à tailler, des timbres à coller, des élèves à tondre, d’autres à regarder ou que sais-je encore ?
La salle de permanence est accolée au bureau du conseiller principal d’éducation, par conséquent, les élèves traversent le dit bureau pour entrer et sortir de permanence : transit = foutoir.
Appel téléphonique de madame Le Corre du collège Vieux Port :
- « Attention ! Ca va sonner dans trente secondes et des élèves étrangers à l’établissement essaient de rentrer. Il faudrait un surveillant dans chaque cour. »
Je me précipite hors du bureau, je trouve les autres surveillants.
Madame Le Corre est le principal adjoint.
Elle surveille l’entrée du portail, aidée de surveillants.
Personnellement, je suis inutile, je ne suis pas en mesure de discerner les élèves inscrits dans l‘établissement des autres. Je vais donc m’occuper de ranger les élèves dans la cour lorsque retentira la deuxième sonnerie.
C’est alors, que survient une dame.
Son fils ne pourra pas effectuer la retenue qu’on lui a infligé le vendredi matin car il doit conduire sa petite sœur à la maternelle ; aussi, désire-t-elle que son fils fasse sa colle le vendredi après-midi.
Elle cherche le conseiller principal d’éducation, il n’est pas là.
Je lui propose de contacter l’autre CPE, celui de l’annexe du collège, celui de Lecas.
Sur ce arrive Michel, le CPE recherché.
La dame est pressée. Sur ces entre faits entre dans le bureau des surveillants le père d’une élève, accompagné de son petit garçon. Il vient chercher sa fille pour l’emmener faire des examens médicaux.
- « Tu sais, on les a faits en Algérie, et là on les a pas. Ici, c’est mieux qu’en Algérie, là-bas, tu sors comme tu veux. »
Je branche ce père de famille avec Sylvain, un militaire, puis avec Michel.


Il a neigé sur Artigues



Les bras en croix, sur sa couche angélique, Flavia est endormie…
Sa frimousse est apaisée, ses traits sont détendus ; bouche et yeux sont clos.
Un souffle régulier soulève sa poitrine bordée jusqu’à la hauteur du menton.
Ses petits doigts sont innocemment dépliés à quelques pouces des barreaux de bois vernis qui encadrent son lit d’enfant.
Rêves-tu ? Certainement.
A quoi donc ? Probablement à toutes les singeries que papa et maman ont mises en oeuvre pour te voir et pour t’entendre rire aux éclats.
Pour voir ton fin minois arborer détendre sourires ton joli nez se retrousser, tes grands yeux bleus qui s’étonnent et qui brillent du rire cristallin de l’enfance.
Dors mon amour ; demain matin, ton cœur de bouche nous régalera de merveilleux gazouillis mêlés à de doux rires enfantins.

Bonne nuit

Papa.









dimanche 10 décembre 2006

Les chandelles


Au dix-septième siècle, les enfants avaient peur des ombres oubliées par la lueur des chandelles, illuminant d’autres endroits.
Dans les pièces aux portes dérobées, dans les coins sombres, les jeux de lumières virevoltant, animaient les objets et les parois chatoyantes des alcôves dorées.








L'amour est comme les blés



On ensemence la terre comme on ensemence les cœurs.
Les blés germent sous terre comme l’amour secret.
Les blés crèvent la terre comme l’amour, au grand jour, apparaît.
Les blés croissent sous le soleil comme l’amour grandit.
Puis, survient la moisson où les blés sont fauchés.
L’amour se brise comme se bise le foin séché.
Il se consume comme un feu de paille en été.
Il se transforme en souvenir comme une meule de foin, au fenil, remisée.
L’amour est comme les blés, il peut aussi ressusciter.
Les grains de blé moulus donnent le pain.
Sa mie est chaude et moelleuse, sa croûte craque sous les doigts.
L’amour renaît, se gonfle.
Sa fibre est chaude et moelleuse, sa croûte craque sous les doigts.
Le pain nourrit, l’amour nourrit.
Le pain se partage, le pain se multiplie, l’amour aussi.
Puis arrive un jour où l’amour s’assagit.
Les toits de chaume abritent le foyer.
Ils sont chauds et envoûtants, comme l’amour, ils défient le temps.








Précarité



C’est bizarre cette sensation de précarité qui fait suite à la mort. La mort, c’est quelque chose de définitif, de stable, d’immobile, d’éternel.
Et pourtant, elle engendre ce sentiment d’instabilité ; rien de ce qui nous entoure ne nous appartient parce que nous mêmes ne nous appartenons plus. Nous devenons subitement locataires de nous mêmes.
Seule compte alors, la théorie de la relativité : On classe, on relativise, on évalue les événements de la vie, que l’on épingle sur une échelle de valeurs.
Rien n’a d’importance face à la mort.
Soudain, tout devient léger, seul compte l’amour, seul vaut la vie que l’on rêve de vivre, le reste n’existe pas, le reste n’existe plus.
La vie n’est-elle pas étrange ?
Tu n’es jamais venu chez nous. Les marches qui conduisaient à notre gîte étaient trop nombreuses pour tes jambes de laine, et à présent tu es là : un tas de cendres grises contenues dans une petite urne veinée de marbre miel.
Le contenant est aussi fin que le contenu, aussi fin que toi, que ton esprit, que tes mains, que tes jambes finement veinées, que tu rechignais à dénuder, sous ton short bleu ciel.
Polo de coton, chapeau de paille et short bleu ciel, voilà une image qui me rappelle l’été, ton été. Mais, à présent, tu n’es plus.







Cum pane



Partager son pain, sa compagne : cum pane.
Puisque l’ancienne langue le dit, rendons lui justice, que nos langues languissantes aillent lécher d’autres langues nouvelles.
Allons porter la bonne nouvelle de nos bouches gourmandes : « La chair est fraîche, la chair est ferme, aimons nous les uns les autres, charnellement s’entend, l’Atmân s’envole au gré de nos folies ».
L’individu s’épanouit, le couple a plus de fruit.
Donnons cette chance à nous qui sommes encore en vie.
Vivons pour eux, pour ces âmes mortes, ces parents et ces amis qui n’ont pu s’affranchir de la monotonie.
Allons voir ailleurs si l’herbe est plus verte, ne jouons pas les Attila mais savourons le Kama-Sutra.
Si tel est notre Karma, il faut s'y abandonner pour se mieux retrouver.
Leurs deux flammes dressées brûlent en silence, il est temps qu’elles crépitent, que coule la lave !
Ils vieillirons ensemble, l’anneau est toujours là.
Il t’aime, tu l’aimes, vous aimez, ils vous aiment et c’est ainsi.










Véronique


Véronique est assise à son bureau.
Devant ses yeux éteins : une machine à écrire en braille, un clavier de quelques touches seulement.
Une machine mécanique comme les vieilles machines à écrire des années 50, que l’on retrouve à présent dans les dépôts-ventes au milieu des phonos et des objets poussiéreux.
Une machine bruyante comme l’Enfer qui perfore le papier blanc comme une mitraillette mitraille une cible en carton.







La mort m'a parlé ce matin



La mort m’a parlé ce matin, pépé m’a appelé : « Maren », « bonjour Maren, qui c’est ça ? »
Sa voix était grave et monocorde, une voix d’outre tombe, inconnue des vivants.
La mort n’a pas qu’une faux, elle a aussi une voix.
La mort vit dans le corps des mourants, elle les gangrène, puis vomit outrageusement, par les pores détendus, ses reflets verdâtres ; alors, elle fait résonner sa lourde cloche dans les bouches béantes.
La mort n’est pas seulement ce visage céreux, figé dans la pénombre.
Elle travaille, elle mange, elle ronge, elle vit.
Lorsque le moribond est mort, c’est qu’elle digère; triomphante, elle s’exhibe aux yeux des vivants, et ce n’est qu’après, lorsque le mort disparaît, qu’elle part, elle aussi, vers d’autres vies.








Epitaphe



Ci-gît Georges Lafforgue : fils, frère, mari, oncle, frère, beau-frère, grand-père mais, au désespoir de son petit fils, pas encore … arrière grand-père.
Pourtant, les années étaient là en abondance, presque innombrables.
Quatre-vingt douze années de lumière !
Quatre générations de vingt ans et un vieux whisky de douze ans d’âge !
Lorsque je mis le nez dehors, mon grand père «venait d’avoir dix huit ans » … et un demi siècle.
Sa vie, depuis longtemps déjà, tournait au ralenti, accrochée à ses jeunes années comme de vieux souvenirs à dire et à redire.
Il y avait belle lurette que la truelle avait rejoint le ciel !
Seules quelques photographies m’ont fait savoir, qu’un jour, lui aussi, avait joui de la vie comme on chante de refrains ; jeune, il avait été, vigoureux et blagueur, séduisant et distingué.
Ma grand-mère, durant toute sa vie d’épouse, l’aura aimé comme la lune aime le soleil.
Sur la fin de ses heurs, nourrice elle se fit, son mari devint son petit, son enfant malade qui appelait « maman !» souvent, qui appelait « Jacqueline » en mourant.
Il n’en finit pas de mourir ; jusqu’à ce que survienne la caresse de la nuit…
Seul son humour lui survécut et il résonne, encore aujourd’hui au tréfonds de sa descendance dont je fais partie.

« Pépé, ton rire torrent, ta voix rocaille et tes yeux de saule, qui pleurent de rire et de douleur, suivant les saisons du ciel, suivant les saisons de ton cœur, seront des paysages figés dans nos mémoires où nous viendrons souvent te retrouver ; »

A bientôt, sous d’autres cieux que j’espère plus radieux…

Ton petit fils, Laurent.






samedi 9 décembre 2006

Amour ou jalousie ?!



Trois heures du matin.
Les cornes de l’angoisse tourmentent ses tripes enchevêtrées comme des anguilles.
La raison ne parvient pas à triompher du sentiment.
L’expérience est insupportable.
Fermer les yeux serait plonger au milieu de leurs ébats réels… ou bien fictifs, peu importe.
Elle est là-bas, avec lui, ils sont ensemble, l’un en l’autre ou l’un à côté de l’autre, unis dans la chair, unis par le regard, complices du sourire, complices des fous rires.
Est-ce bien là de la jalousie ? Non, c’est de l’amour.
En tout cas, ça comprime le souffle, ça suffoque, ça étouffe, ça fait jurer, ça fait maudire.
Et pourtant, elle en a le droit, il le lui a accordé. Il a le premier transgressé les liens sacrés.
Alors pourquoi cette haine ?
Pourquoi cette colère ?
Pourquoi cette intolérance ?
Pourquoi ce mal-être si profond ?
Revenir en arrière, tout effacer. Cela ne servirait à rien.
Ils se sont avoué que, de toute manière, ils allaient dans le mur, alors !
Plus de croix affichée entre les seins, trop de symboles, trop de caresses sous ses yeux, jaloux de son trésor.
Cette croix blanchâtre, claire, laiteuse, cette croix d’albâtre, d’ivoire, de mains, de bouches, de corps, de sang qui pulse, de cœur qui bat ! Plus de croix visible ! Plus de présence de lui, lui d’évidence !
Plus de prénom, plus d’identité.
L’invisible, le secret, le comme si, le jamais… il va falloir y penser.
Il ne veut pas savoir, il ne veut rien savoir, il veut l’oublier, lui, pour la retrouver, elle, et croire qu’elle est encore sienne.
La même passion, que celle qui rugit pour l'autre Elle, sort ses cris pour sa femme.
Il l’aime, il les aime, comme il l’aime!

Quatre heures du matin, il vient de parler à l'autre Elle.
Un bouche à bouche salutaire. De l’oxygène !!!
L’air vicié de la haine, l’air putride de la jalousie s’est un peu fait grignoter.
Et, pourtant… cependant, il espère qu’elle a vécu ce qu’elle avait à vivre, ça lui arrache la main d’écrire ça !
Il ne la blâme pas. D’ailleurs, c’est plus fort que la raison, c’est plus fort que lui, c’est plus fort que tout, ça ne se discute même pas.
C’est le cœur qui saigne, même si on lui avait parlé au cœur, avant ; même si on l’avait prévenu ! Il était au courant, il faisait son malin ! Mais là… il ne rigole plus le cœur là, hein ?!
Il fait moins son fier ! Allez, va te coucher.
Comment réagiras-tu quand elle rentrera ?
Comment la regarder ?
Comment ? Comment ? Comment ? Il verra !
L’amour a toutes les réponses, s'il est fidèle, il l ‘aidera à supporter tout ça.


Gautier



Un, deux, trois… je suis la mort, me revoilà, tu m’avais oubliée, mise de côté, mais je n’étais pas bien loin. Dans les entrailles de ta cousine, je couvais mes noirs desseins ; à Dame la vie, ma rivale, mon ennemie, j’ai joué un de mes tours favoris : J’ai surgi avant que la prêtresse n’apparaisse, je m’en délecte, j’aime lorsque j’anéantis.
Un, deux, trois, je suis partout, ne m’oublie pas ; j’ai capturé Dame tristesse et, à présent, elle te tient compagnie. Elle t’entoure, elle t’enlace. Et toi ! Tu tombes, tu trépasses. Elle est en toi, elle t’embrasse. Sa sœur Mélancolie est là, aussi ; mais ne leur cède pas encore, sois plus fort, réagis ! Chasse là de toi.
Un, deux, trois, elles sont plus fortes que moi, je n’y parviens pas. Je la connais, la mort, et ne peux baisser les yeux face à sa loi. Il me faut te contempler lorsque tu parais, quitte à me brûler, tu es une force comme moi, elle brûle et consume. Je suis à vif, c’est horrible, mon cerveau se réduit, mon corps se cache, mon cœur grossit, mon cœur occupe tout l’espace. Ca y est… Je suis un cœur. Ahimè di me ! C’est pure folie !








Où sont-ils ?



L’âme noire est en partance, loin de moi, elle vogue, sur les flots du Styx, elle se consume.
Adieu, chienne méchante, crève comme ceux de ta race savent crever !
Noyée, au fond d’un sac lesté d’un pavé.
Tu m’empêches de rêver, tu séquestres mes songes et éloignes la vie.
Tes tenailles rougies arrachent les viscères des pauvres hères, mais, une fois trouvée la parade, pour te vaincre et te briser, alors, on respire de tout son être, les couleurs de l’arc-en-ciel apparaissent au beau milieu du cœur et l’on rit, on rit à pleines dents !
Avec l’envie de mordre l’air pur, de voler dans l’azur.
Mon petit monde figure sur les cinq doigts de ma main. Sur mon annulaire gauche, trône ma compagne, d’or couronnée, sur mon auriculaire, juste à côté, se tient ma sœur d’âme bien aimée, mon majeur, lui, est à l’image de ma mère, le doigt fripon et vif.
C’est sur l’index que mon père repose, sur ses gardes, toujours dressé.
Sur le pouce se campe la douce croyante, jadis libertine.
Lorsque mon poing se serre, ils sont tous réunis, couchés sur ma paume encore douce et tiède.








Ma feuille d'automne


Ma cour est rousse de la nuit,
Hier encore, c’était la récréation.
Les arbres s’attristent.
Ils frissonnaient.
Ce sont de vieux platanes décharnés par l’hiver.
L’automne agonisait au pied des centenaires.
Un tapis de feuilles mortes se brise et se froisse sous mes pas,
L’école primaire avait le goût des bois.
Temps béni où je jouais aux billes, au pied de ces géants d’autrefois.
Hier encore, c’était la récréation, hier, avant, il y a longtemps.
L’automne gît sous mes pas, et l’odeur de la feuille morte monte vers moi,
Les platanes me transportent au temple des cache-cache, des trappe-trappe,
Du colin-maillard et du chat.
La feuille me rappelle, la feuille m’appelle,
C’était moi, il y a …








vendredi 8 décembre 2006

Avant ... dans mon salon, la liseuse lisait ...




L’arbre du Japon frissonne au gré de ma plume, il trône majestueusement sur la table du séjour, cette même table où je m’évertue à décrire mon salon avant la tempête.
Demain, en fin de matinée, cette pièce où se trouve un vieux sofa défoncé, s’embellira de trois nouveaux éléments.
C’est en effet, un salon en tissu, composé d’un canapé de trois places et de deux fauteuils, qui prendra place dans ce paradis blanc.
Plus tard, la blancheur hospitalière de cette pièce perdra de son éclat au profit d’un tapis oriental, capable, à lui seul, de couvrir le sol du salon.
Mais, aujourd’hui, tout est immobile.
Le carrelage fait écho au plafond sur lequel est solidement fixé un ventilateur à quatre hélices bois et or d’où pointe une énorme ampoule blanche égale à la couleur du globe.
Le long du ventilateur, pendent deux chaînettes métalliques, terminés chacune par une plaque, le tout doré et immobile, jusqu’à ce qu’une fenêtre s’entrouvre.
Au fond de la pièce, au sommet d’une affreuse bibliothèque en pin, Jupiter, sous les traits d’un aigle impassible et massif, déploie ses ailes dans le silence.
Des vers gloutons le perforent de part en part, le transformant, peu à peu, en cheval de Troie.
Gageons qu’il paraîtra, un jour, aussi décharné et misérable qu’un oisillon tombé du nid.
Pour l’heure, il demeure fort comme le bois dans lequel il est taillé. Son regard végétal scrute la poussière depuis les hauteurs.
A sa droite, figure un minuscule gong, portant un marteau de bois au bout arrondi.
Un peu plus loin, accroché sur l’Immaculée Conception, la Liseuse est éternellement penchée sur la même page, depuis plus de deux cents ans.
Vêtue d’une robe jaune, confortablement installée dans un fauteuil au coussin moelleux, elle tient son livre de sa main droite, tandis que sa main gauche repose sur ses jambes. Elle est si confortablement assise que voilà deux cents ans qu’elle n’ose bouger, de peur de ne plus retrouver cette position si apaisante. Aussi, lit-elle, depuis lors, la même page du même livre, chaque jour que Dieu fait.
La nuit, elle ferme les yeux pour s’endormir, et ce n’est qu’au matin, à la lumière de l’aube, qu’elle reprend son inlassable lecture. Ce qu’elle lit ? Nous ne le saurons jamais.
Toujours est-il qu’elle ne souffre pas, ni de crampes, ni de douleurs cervicales.
Son chignon est toujours bien mis, ses cheveux ont cessé de pousser le jour où elle a cessé de tourner les pages de son ouvrage.
Après le mythe de Sisyphe, nous voilà confrontés au mythe de la Liseuse. La nuit venue, alors qu’elle ne lit plus, elle rêve de poursuivre son histoire, aussi, tisse-t-elle, au creux de son sommeil, la suite de cette page. Chaque soir la Liseuse crée une nouvelle histoire.
Au dessus de cette jeune fille, sur un meuble bas, moyenâgeux, clouté, portant chaînes et clous, est posé un coffret du même acabit ainsi qu’un vase érotique orné de quatre Vestales nues; plus languissantes les unes que les autres.
Devant l’affreuse bibliothèque, servant de piédestal à Jupiter, se trouvent moult plantes d’intérieur : yuccas et ficus cohabitent dans la plus silencieuse intimité.
Enfin, dans l’angle du salon, au coin, là où l’on envoyait les élèves indisciplinés où ignares, a été installé le meuble renfermant tous les appareils à bruits et à images. Sur ce meuble : un écran translucide et une enceinte. Les portes de ce meuble sont souvent fermées, ainsi, l’horreur mécanicoélectronicaudiovisuelle est cachée.
Au dessus du « téléviseur », fait irruption, sur le paysage blanchâtre, une autre jeune fille, charmante, elle aussi, mais beaucoup moins sage que notre liseuse. Elle est littéralement vautrée sur des peaux de bêtes. Un bassin, lui sert de fond, dans lequel croissent des nénuphars.
En hauteur, à proprement parler, dans l’angle du salon, il y a une console en pin, jadis travaillée par l’oncle Marcel. Sur celle-ci est couché un bouquet de fleurs séchées, sur le mur de façade est placardé un ancien ami, symbolisé par un plateau cuivré, exécuté artisanalement dans son pays.
Face à ce même mur, une colonne en merisier contreplaqué abrite notre mémoire musicale. Mais qui est ce curieux personnage également cuivré, qui surplombe la colonne et domine l’espace ? Cet homme se nomme Dante Alighieri.

Le coucou des Calzato





Le coucou des Calzato est à leur image, il est bruyant et frénétique.
Il rentre, il sort, fait son remue-ménage,
le verbe haut et le geste vif, il dérange puis se cloître,
porte close et bouche cousue, on ne l’entend plus.
Réglé comme du papier à musique, sa vie est rythmée par les heures lentes de la retraite !

Adéquation parfaite entre les cours dispensés en Fac, relatifs au programme du CAPES et ma 3°em1 du collège Vieux Port.



« De quoi avait l’air la mère de Leopardi ? Ceci pourra nous aider à comprendre le concept de ‘la natura matrigna’. »
- « Eh oui, aujourd’hui, mes chers élèves, Aziz, Souad, Abderamane, tel sera le thème de notre cours.
Nous aborderons également, le problème de la transcendance et nous concluerons, si toutefois, nous en avons le temps, par l’explication du concept du ‘peregrino’ qui débouche, la plupart du temps, sur une projection syntaxique.
Alors, pour commencer : quelques données biographiques.
- « Oh, monsieur, le léopard y niquait sa mère ?!!! »
- « Non, Souad, Leopardi n’avait pas et n’a pas eu de relations sexuelles avec sa mère.
Je te rappelle que ce n’était pas un animal, Il ne s’agit pas d’un léopard, il s’agit d’un homme, un poète, et son prénom est Giacomo.
Noous allons étudier la folie et nous nous efforcerons de raisonner sur la folie et la maladie mentale du plus grand poète romantique et anti-romantique italien et universel de la monde entière.
Le texte est inachevé parce que Leopardi, lui même est inachevé ….







Faut s'méfier des histoires de fesses !


Le voisin pisse au dessous de nous, on s’en cague, tant qu’il nous pisse pas dessus.
Nous, tous les matins, on lui chie d’ssus et toute la journée on l’arrose d’urine jaunâtre.
Et, il n’a rien à dire, de toute façon, on l’emmerde ! S’il nous fait chier, on lui pisse à la raie et j’dirais même plus : On lui cague à l’œil.
Non, mais ! C’t’espèce de coincé du cul, y va pas nous chier une pendule pour une histoire de chiottes ! Espèce de chieur !
Vraiment, pour des conneries, y’en a qui chient un peu dans la colle. Y méritraient bien d’être torchés vite fait.
- Au chiottes les pisses-froid !
- Et ta sœur, elle pisse bleu ?
- Eh, mec, fais pas chier ! Faudrait pas pousser mémé dans les orties, surtout quand elle a pas d’culottes !
- Si tu m’emmerdes, ça va chier des bulles !
- Arrête de faire ton boudin ! Tout ça parce que ta femme en est un gros … de boudin …
Et puis, d’abord, c’est pas une raison pour mâter les autres nanas !
Si tu continues, boudin pour boudin…Y va y en avoir… Et moi, tu sais, une fois qu’on m’a chié dans les bottes… J’me lâche, et c’est la chienlit qui commence :
- Je sonne l’attaque : « Tiens, voilà du boudin, voilà du boudin, pour les Alsaciens, les Suisses, et les Lorrains, pour les Belges y’en a plus, pour les Belges y’en a plus, ce sont des tireurs au cul, ce sont des tireurs au cul ! »
Quelle histoire à la con ! Et dire que tout ça s’est fini en eau d’boudin…
C’t’enfoiré y s’est chié d’ssus et il est renré chez lui, c’fumier !
Il a jamais plus osé posé ses gros yeux marrons sur ma femme.
Alors, vous pensez bien, la castagne a foiré et c’est mieux comme ça,du reste.
Ca m’aurait troué l’cul d’voir, ce mange merde, se mettre en garde dans la cage d’escalier !
Il aurait d’abord fallut q’y s’bouge son gros cul pour m’toucher !
Un gaillard comme moi, qui descend cul sec une dizaine de bières… Faut s’remuer l’popotin avant d’m’atteindre.
Vous pouvez toujours d’mander aux culs terreux qui sont toujours restés au bled d’où j’viens,
y vous l’diront que quand j’étais môme, j’courrais pas comme un cul d’jattes ! J’les f’sais galoper mes miches !
Et y’en avait pas un pour me rattrapper… J’leur mettais tous dans l’cul à ces trouducs !









Les deux stèles


Sur ses flancs croissent des pins parasols.
Le ciel varie suivant les saisons.
Capricieux, il surplombe le noir goudron.
Ici-bas, la route est étroite et sinueuse,
Un serpent, au fond de ce vallon ombreux.
Au fil des tournants se dévoilent ces malheureux,
Au hasard des virages, une stèle commémore.
Fleurs et couronnes décorent les cils herbeux.
A quelques lacs, s’appellent deux stèles immobiles,
Le silence s’engouffre dans le vallon des morts.
Le serpent a mordu deux âmes tranquilles.
L’une, un rocher au sol couché,
Au pied de la forêt, attend ses fleurs.
L’autre, un oiseau aux ailes brisées,
Juché sur les hauteurs, entend tes pleurs.









La vie à vif



Ils étaient là, debout, pieds et poings liés.
Un épais bandeau noir, serré sur leurs yeux hagards, errant sur le tissu effiloché, incitait le regard à deviner.
Mais, l’attente, entre nuit noire et soleil de plomb, ne les trahissait nullement.
Sous cette chaleur suffocante, le dos tourné au mur, ces pauvres garçons croupissaient dans la moiteur de leurs vieilles hardes.
La peur envahissait leurs tympans, puis leur cœur, lorsque, sur un compagnon, la mitraille déchargeait sa fureur.
Les pas hésitants d’un homme qui chancelle, le bruit sourd d’un corps qui s’affale... l’image obsédante défilait sans cesse dans la nuit noire, sous ce bandeau ne mystifiant en rien la réalité.
Des cris brefs, une agonie écourtée par l’ultime salve et le corps des vivants qui tressaille, tressaille.
Sous la chaleur torride, des veines de sang noirâtres ruisselaient sur les cops inertes, donnant naissance à des flaques nauséabondes.
Le goutte à goutte du temps rendait la vie intolérable.
La mitraille avait cessée, mais, l’effroi résonnait, tel un écho, dans leur âme candide.
Le parfum musqué du sang, brûlé par le soleil, annonçait la terrible odeur de la mort, anéantissant tout espoir de salut.
Des larmes roulaient sur leurs joues imberbes.
Puis, le terrible cracheur de feu déversait, de plus belle, sa haine de souffre et de plomb, dans les cœurs déchirés par les cris des fusillés.
Des cris argentins qui couvraient avec force le tonnerre d’airain de l’affreuse machine.
Des cris humains capables de transpercer la vile carapace, de mettre à nu l’humanité enfouie de quelques soldats.
Des soldats, aveuglés par les larmes, le souffle court, l’âme blême, qui peinaient, à présent, à achever leur ignoble besogne.










jeudi 7 décembre 2006

L'incandescence est soeur d'innocence


Le sombre breuvage que Dyonisos offrit,
verdit la terre pour mieux rougir les hommes.
Dans l’incandescence brille l’indécence des sens.
La même pourpre rougeoie leurs veines outrées.
Le jade en gésine charrie le rubis écarlate.
Le vert le cède au rouge,
les veines fleurissent sur les corps barriques.
L’ivrogne, gorgé de lave incandescente,
nourrit sa peau enfiévrée de vergogne luisante.









lundi 4 décembre 2006

force et folie douce






Une pie sautille sur le toit terrasse,
La folle est en liberté,
Les voix rugissent dans l’écrin nocturne,
Elle picore les galets qui parsèment la surface,
Elle a brisée ses liens,
Ici, les hommes ont des lèvres d’oiseaux,
D’humeur changeante, l’oiseau s’envole,
Sa tête est déchevelée,
Un lion musculeux dévore leur gorge angevine,
A tire d’aile il chevauche l’éther.
Elle hurle avec les chiens.
Leur chant est un démon qui flambe les cieux.
















Valarmos ristroulu



Aricrounichkou it ameni out pultoz,
Riclvde oaoot, chaclala iblede itoum,
Frazure itacha arnu madet.
Marou,
Itazeur bleudour racaceur metelek.
Tatoulima! Tatoulima!
Roustriclo artus it lamare pilrout.
Tilouni estrouillon manicar?
Zaza…
Rouletis armetes,
Trizzzz…
Mapouillou it saoulam, Siloubam ?
Racata ! tutamayor erte zitoume,
Blai ichou toutarina,poulichani,
Mouchbayou riclama izato partulu.
Zacar mlound zable chouchir pat,
Cacito ablen didoum granemit.
Gougou, hitamoul lars,lars…

Moultickem

Iztubrum.







Kauther

Bienvenue, Kauther,

Fleur mauresque de son cœur de beur

Enfant des sables,

Déjà tu le savais,

Clarté de son âme,

Longtemps il l’ignorait,

Chimère de ses songes,

Ton cœur maure l’espérait,

Vérité qui le ronge,

Hier, tu l’épousais

Les humaines infortunes



Au creux de ma montagne,
Je suis à l’abri des humaines infortunes ;
Si ma montagne se courrouçait,
J’irais rejoindre mes tendres pierres vêtues de mousse,
Sous les chênes immobiles,
Je logerais dans l’argile,
Le vent couchera les herbes,
Mais, je n’en saurai rien,
Seules leurs racines tranquilles,
S’enfonceront dans ce que je fus lorsque je buvais le matin.
Dans ce lit de terre brune,
Loin des humaines infortunes,
Mon repos serait sylvain
Et
Mon âme, happée par sa mère, la lune
Délivrée des humaines infortunes,
Serait comme cet homme safran du Tibet lointain







La chanson de Jésus



C’est la chanson de Jésus,


Buvez ses plaintes qui volent vers vous,


Mangez sa chair meurtrie par les clous,


C’est la chanson de Jésus,


Il meurt de joie en priant pour nous.

S'entremêlante



Un réel fantasme finement mis en scène.
Une justification de plus pour réaffirmer que la vie vaut la peine d'être vécue, en apesanteur, loin du poids de nos tristes chaînes si bruyantes.





Leur crinière s’emmêlent, ils s’aiment pêle-mêle,
Plus de loi, de la soie, de la joie,
Tempête sous les toits aixois,
Leur étreinte dure, s’évade par delà les murs,
La rue bavarde, la rue musarde,
Le bruit domine, leur désir culmine,
Elle est à toi, tu la bois,
Il est à toi, il aboie.
Leur étreinte dure par delà l’azur.
Des parfums mutins caressent ses seins,
L’ombre mâle triomphe dans le Jourdain.
Main dans la main, leur étreinte est pure lorsqu’il vient.
Ils demeurent dans la sueur de leur chevelure
Leur étreinte est sûre, ils se jurent par les yeux
Des je t’aime, des je te veux.
Leurs heures sont lentes,l’amour les hante.






Un soir d'été



Lascive est la cigarette
La fumée s’essouffle au coin des lèvres
La bouche lutine la nicotine
Elle s’envole
Lascive est la cigale
Le chant s’essouffle au coin des ailes
Pour bruire, la diva lutine le vent
Elle s’envole
Bélître au papier brûlé, élytres au soir froissées
Elle meurt sur sa moue, elle pleure sans lueur

Ecriture automatique







L’étreinte de ton ombre transperce mon regard, tu m’inondes de ta nuit morne et sans chaleur, mon sang se durcit au rythme de ta voix qui sombre dans les cordes de nos vies pluvieuses où naguère des ancres marines s’enfonçaient mollement dans la lune brune où je te connus par hasard au gré des flots rageurs qui me faisaient outrage ; moi, naviguant sur ce chaland sans age, sur lequel mon repos cherchait sa sœur jumelle, perdue dans ce troupeau, où, seule, elle étincelle, fleurant les fleurs de l’astre à demi mort qui brille.
La lune, cette Dame qui chante une eau divine où mon chaland s’endort, à présent, sans ardeurs, où je t’attends, le cœur crevé par le malheur que cache un sablier de regrets d’homme Lyre, coulant à l’intérieur, suivant les grains du temps, tombant dans ce coffre que voilà devant toi, prends le et va-t’en.


RIMBAMBIRE



« Papa, maman ! »

Mon grand-père se meurt en silence, la mort danse dans sa tête, il l’appelle, il la repousse, elle arrive en dansant et s’éloigne en dansant.

« Papa ! » « « Maman ! ». « Ma mère a tant souffert qu’elle est dedans sa tombe et se moque des bombes et se moque des vers ».

Tu as beau les appeler, pépé, seule leur image flotte dans tes souvenirs mais, tu les as tellement chéris tout au long de ta vie ! Tes yeux s’étoilaient de larmes lors de tes récits familiaux ; tes yeux… si malicieux, ils brilleront bientôt dans les cieux.

Comme c’est étrange : « Papa ! » « Maman ! », la vie s’enfuit de ton corps mais ton enfance est contenue dans ton dernier souffle ; avec lui elle ira dans les brumes blanches… Mais pas avant.
Les Italiens ont forgé le verbe, cioè ( c’est-à-dire ) tornare bambino : retourner, redevenir enfant. Ce mot est doux comme ton âme, il résonne de tes jeux d’enfant : RIM ! BAM ! BIRE ! , de tes courses, de tes rires torrents, de ta vie d’avant.
Les italiens parlent d’un parcours, d’un voyage, d’une régression lente : ils retournent, à pied et à mémoire, là où les Français « retombent » brusquement comme une masse décrépite et grave.
RETOMBER : tomber à nouveau, comme si la première expérience de l’enfance était douloureuse ; si l’on retombe, c’est bien parce qu’au départ, il y a eu une chute : TOMBER, CHUTER, que de souffrances dans ces verbes là.
L’enfance est-elle si brutale, si douloureuse que ça ? Certes non.
« RETOMBER » : double chute, double douleur.
Outre la douleur, la chute engendre la déchéance.
L’enfance, cet age « idiot » où l’on n’est pas un homme responsable, sérieux, grave, mûr et réfléchi ; triste, conscient, souffrant, travaillant et luttant.

Qu’elle est jolie la vie de l’homme !

L’enfance, vue comme une époque à enfouir, à cacher, à bannir.
Quelle tristesse devant ce verbe : « RETOMBER ». Cet état annonce la mort que renferme la « TOMBE » du verbe. Tout est dit.

« Pépé ! Tu oublies, tu renies ta dignité d’HOMME, ton honneur, ton orgueil, ta force ; tu déchois et tu t’enfuis dans la petite mort du début de la vie : Tu les emmerdes ! »

RIM-BAM-BIRE : quelles joies dans ces sonorités ludiques !
Niché au creux de l’enfance, le vieillard qu tu es s’abrite de la pluie macabre, ta vieille carapace se mue en une peau tendre et innocente ; les plaisirs, les images vertes et chaudes combattent tes tourments corporels.
L’enfance danse avec la mort, elle ne la connaît pas ; la vieillesse est enterrée avec ses ombres, l’enfant a tué le vieillard, la mort danse avec l’enfant.
Gloire à toi qui ne méprises pas l’âge tendre ! Gloire à toi qui ne refoules pas ton innocence, ta faiblesse, tes rêves.
Les hommes, les vrais, ceux qui veulent le rester jusqu’à la fin, crachent sur eux-mêmes en crachant sur leur enfance. Ils sont à jamais souillés par la grisaille de leur pauvre moralité, de leur amère réalité, de leur sale conscience.
Les hommes, les vrais, seront trop vieux pour affronter la mort.
Elle les fera danser aussi, elle fera danser leur maturité, leur conscience et leur orgueil.
Ils danseront et l’enfant les regardera tourner jusqu’à la fin. Assis, sur le rebord du souvenir… Il ne leur tendra pas la main.

PLONGER en enfance, REVIVRE son enfance, voilà des mots plus doux, voilà pépé, les mots que j’ai choisi pour exprimer simplement la fin de ta vie.

















Plaine, ma plaine!



Soirée magique dans l’enceinte de l’église Saint Sauveur de Brignoles, grâce orthodoxe déployée par le descendant d’Yvan le Terrible. J’ai nommé le gigantesque Yvan Rebroff.
Récital époustouflant. Tout ouïe au premier rang, face à l’autel où chantait la force.
« Plaine, ma plaine », « Ah ! Si j’étais riche ! », « Nuits de Moscou », « Ave Maria », « Kalinka » etc.…
Présence d’un violoniste hors paire : Yoshi, qui fit éclore de ses cordes de petits oiseaux au chant paradisiaque ! Sans oublier la fameuse chorale du « Vent des collines » de Brignoles qui a ajouté à l’atmosphère enchanteresse de la soirée.
Yvan est souvent venu chanter devant nous, réduisant ainsi sa distance de quatre mètres à cinquante centimètres. Souvent, aussi, il se mit à déambuler dans la travée centrale pour contenter tous ses auditeurs.
Trois tenues différentes, une toque imposante et un manteau de la Russie profonde !
Sans oublier ses bottes de cosaque sur lesquelles étaient incrusté L’aigle impérial du Tsar de toutes les Russies.
A la fin du récital, Yvan nous a dédicacé trois photos.
Et puis, je lui ai demandé une faveur : « Pourriez vous poser votre main sur le ventre de la maman de la petite Flavia ? »
« Ah ! C’est une petite fille, vous êtes sûrs ? Alors – au moment de dédicacer – pour le petit Yvan…Euh…La petite Flavia… » Puis, il s’est approché, juste en se penchant en avant vers ta maman, tout en restant assis sur son banc ; il a soulevé sa chemise et, délicatement, il a posé sa main de géant sur toi, ma petite Flavia. Fasse qu’il t’ait fait partager de sa force, de sa puissance !
Alors qu’il faisait mine de t’écouter bouger, alors que tu ne bougeais pas encore, il dit : « applaudissements ! »
Lorsque nous eûmes tourné l’église, une ville médiévale, déserte, en proie à la nuit, s’offrait à nous.
Nous descendîmes un escalier que jadis, les pénitents devaient emprunter.
Puis nous sillonnâmes quelques ruelles et venelles avant que de regagner notre bercail varois.






vendredi 1 décembre 2006

Le voile de la mort

Nous avons tous une image fixe du tableau familial.
Puis, au fur et à mesure que passent les années, passent aussi les couleurs.
La patine et la poussière viennent le noircir, jusqu’au jour où l’ombre noire s’y colle.
Puis deux, puis trois.
Toujours le même tableau, toujours le même cadre.Mais l’image se voile, c’est le voile de la mort.

Les vignes roussissent

« Patience et longueur de temps font mieux que force ni que rage » nous enseigne le fabuliste, alors laissons faire le temps et comptons sur notre bonne étoile.
Là-haut, les vignes roussissent, l’air est vif et piquant, l’herbe humide se mêle aux senteurs de champignons, la haie est verte et feuillue, les poumons de la vie sont en marche, le sol n’attend plus que nos pas, l’air n’attend plus que nos rires, le vent n’attend plus que nos yeux.
Nous nous attendons mutuellement, jusqu’au jour où…

RESPONSABILITE

Ineffable sensation, tombra…tombra pas, tralala !!!
La corde est raide et glacée. Qu’y a-t-il en dessous ?
Un matelas de roses moelleux à souhaits ou bien un tas de fumier noirâtre ?
Cette responsabilité, res pon sa bi li té, répondre de son habileté, être habilité à…
Quel ennui.
Il faut rendre des comptes, ne compter sur personne, tenir ses comptes de peur qu’ils ne galopent, brides abattues, vers la ruine.
La vie est-elle à ce prix ?
Comme ils seraient doux ces comptes, s’il s’écrivaient ainsi : « contes », faire des contes, conter, l’envol de la res pon sa bi li té, tout le poids et l’inquiétude…évanouis dans le jeu et la légèreté du « vivre », du livre.
On n’y songe guère, mais il s’agit bien d’un poids qui grave et grave, grave sur le corps et grave dans l’esprit, l’inquiétude.

RES : tout
POND : Poids, pondérable
BIL : bile, souci chronique

Dans la liste des mots à bannir, figurerait celui là.

Dove andiamo ?

Tu mi stai scappando via
Le tue stramberie sono lusinghe
Io non ti posso accontentar
La tua salvezza non è plurale…

Et la lumière jaillira !




J’suis un con, entier et indivisible ; orgueilleux peut-être, sincère, franc, loyal, droit, sûrement.
La lèche, connais pas.
J’ai pas la langue assez longue… Fidèle à moi même, cabochard.
Heureux les mangeurs d’air pur ! A moi la liberté ! Toute ma vie « j’écrirai ton nom ».
Les chaînes pour les ilotes, le zéphyr pour les frondeurs !
Avancer à visage découvert, je peux dormir du sommeil du juste, comme le chantait Jacquot : « Et la lumière jaillira ! »